• 09

    Il s’assit en terrain conquis. Comme s’il allait me mettre dans son lit à la sortie de l’entretien. Avec une nonchalance qui me fit regretter d’avoir choisi le canapé plutôt que le fauteuil pour m’installer. Je reculai légèrement.
     
    Il cherchait à me provoquer. Il cherchait à me faire partir. C’était une déclaration de guerre. Et avant de réfléchir à ce que je faisais, je savais que je venais de l’accepter.
    - C'est cela, parlons travail ! feula-t-il, blasé, à ce propos vous me semblez bien jeune... Quel âge avez-vous donc ?
    - 23 ans mais...
    - Une débutante ! C'est bien ce que je craignais ! Avez-vous eu le temps d'acquérir quelque expérience dans le métier ?
    - A vrai dire, je...
    - Rassurez-moi. Vous savez illustrer autre chose que Martine à la ferme ou Petit Ours brun ?
    - Mais bien sûr, je...
    La voix énergique de Mademoiselle Cormon glissa comme un baume salvateur.
    - Mignonne, et si vous montriez à Coriolan vos dessins? Ils parlent d'eux-mêmes...
    - Bonne idée, montrez-moi donc ces chefs d'œuvre en péril qu'on en finisse au plus vite.
    Il était écrivain. Il maniait les mots et le langage. Il m’empêchait de m’exprimer. Je ne pouvais pas lutter par les mots. Je n’avais ni la verve, ni la rhétorique. Mais chacun ses armes, gueule d’amour (c’est vrai quoi, il est chiant, mais il a une gueule d’amour. Ca m’avait frappé à la fac et là ça me revient encore davantage en pleine figure. C’est vraiment pas le moment, en plus)... Tu as le vocabulaire, j’ai le coup de crayon. J’aurai dû lui présenter un à un les croquis que j’avais élaborés et ces autres encore que j’avais terminés en diverses occasions. J’aurais dû partager avec lui le feu qui m’avait animée quand je les avais fait naître sous mes doigts, comme autant d’enfants que j’aurais portés. Mais je lui ai coupé la parole moi aussi. A ma façon.
    Je lui ai tendu le carton. En entier. Qu’il les regarde lui-même. Aïe aïe aïe, ouille, aïe, aïe, aïe.
    Je crois qu’il ne s’y attendait pas. Je crois que personne n’avait accepté jusqu’à aujourd’hui de jouter contre lui. Personne n’avait encore osé affronter son insolence par une autre insolence. Dans son regard j’ai cru comprendre subrepticement qu’il aimait ça. Et je ne savais pas si c’était bon ou mauvais signe pour moi.
    Il feuilleta mes ébauches en silence.
    - Alors, Coriolan, ton verdict ? intervint Adèle sentant que le moment s’éternisait, as-tu d'autres questions à poser à Mademoiselle Parlanti ?
    - Non, toute question serait désormais superflue... Mais j'ai une requête... En forme d'épreuve en fait.  Dessinez-moi donc Olympe de Courge telle que vous vous l'imaginez, me demanda-t-il en me tendant une feuille de papier.
    Nom de Dieu, mais où étaient encore passés mes vêtements ? Ils s’étaient littéralement désintégrés. Son regard appuyé ne me lâchait pas. Le même que celui qu’il avait collé sur ma peau, il y avait cinq ans, au café. Enfin, pour le coup, s’il raclait encore il allait arriver à l’os, là...
     
    J’ai couvert machinalement mes seins à l’aide d’un de mes bras.
    Je me rhabillais ?
    Je quittais la salle ?
    Je renonçais ?
    La garde meurt, mais ne se rend pas.
    Ce n’était plus une question d’argent maintenant. Ce n’était plus une question de dessin. Ce n’était plus une question de roman ou de couverture, d’illustration ou de pseudonyme fantaisiste. Pour lui et pour moi, c’était une question d’orgueil.
    J’ai pris la feuille.
    J’avais parfaitement compris ce qu’il voulait. Il voulait que je lui dessine son pendant féminin. Il voulait que je lui dessine la femme qu’il respecterait. Il voulait que je lui dessine la seule qui soit assez cynique, assez irrespectueuse, assez désabusée par l’amour pour trouver grâce à ses yeux. Digne d’être lui.
    - Pygmalion ne veut pas une femme semblable à la statue. Pygmalion veut la statue, maugréai-je entre mes dents.
    Le problème (outre le fait que je conservais toujours mon bras pour masquer ma poitrine et que ça allait me gêner si je voulais dessiner) était que je savais parfaitement ce que je devais dessiner. Et ce fut dramatique, parce que, forcément, face à l’évidence, je ne pensais plus qu’à ça
     

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  • Commentaires

    1
    Aziiat.
    Mercredi 20 Mai 2009 à 22:24
    MDR ! Pauvre Cassie ! Normale qu'elle se sente nue si sa créatrice l'expose nue devant pleins de lecteurs ! Puis les bouquins, ça devient "hot" entre les deux, là ! J'en sens plus d'une qui vont être supra-contente de pouvoir voir Coriolan ainsi ! xD
    2
    Enaya
    Mercredi 20 Mai 2009 à 23:12
    Je suis over fan des couvertures Harlequins XDDD
    3
    simorette
    Jeudi 21 Mai 2009 à 09:16
    J'ADORE !!!! "L'inconnue que l'on vouvoyait", ça me fait trop rire... en tout cas je suis impressionnée par la trouvaille de tes titres en parfaite osmose avec les mots que j'ai mis dans la bouche de Coriolan !!! je suis véritablement fan !!! depuis le temps que j'attendais le moment de découvrir tes fameuses couvertures, je ne suis pas décue !! en plus j'adore les brush de cheveux... ça rend super bien !! ils sont trop beaux tous les deux !!! Sacrée Cassie !!!!
    4
    Link
    Jeudi 21 Mai 2009 à 09:28
    Et oui ma chère, pour ça que j'étais incapable de finir cette scène sans toi ! J'avais absolument besoin de Corio pour terminer l'image ! Car depuis le début j'avais l'idée de mettre en titres les mots de Coriolan qui résonnaient en écho chez Cassandre. J'attendrai le jour et la nuit, j'attendrai toujours cette scène !
    5
    Koelia
    Jeudi 21 Mai 2009 à 10:03
    Niark!!! La photo perverse où Link a découpé des seins des bras et des bouts de squelettes!!! Sinon trop bien les couv' harlequins! Et ces titres...
    6
    C'ian
    Jeudi 21 Mai 2009 à 15:05
    Pfiouuu !! J'ai mis 100 ans à comprendre que la photo perverse, les barres de fer qui sortaient de la main c'était... les os de Cassie x____x J'suis blonde, faut pas m'en vouloir x____x J'adore les couvertures Harlequin <333
    7
    SheZeve
    Jeudi 21 Mai 2009 à 19:43
    LOl ! Les couvertures typiques des histoires à l'eau de rose xD Les titres le sont un peu moins mais bon...Beau travail ! Surtout les perspectives des bouquins. J'aime bien les 2 dernières couvertures *ç* CORIOLAN TROP MAGNIFIQUE !!! Mon coeur bat la chamade x__________x
    8
    zohus
    Vendredi 22 Mai 2009 à 00:21
    ENOOOOOOOOOOOOOORME !!!!! C'est ENOOOOOOOOOOORME ! "La garde meurt mais ne se rend pas" (Corio... *bave* *Echange sa place avec Cassie* *bave* *rebave*), "Chef d'oeuvre en péril"... XDD Et j'ai cru apercevoir un bout de téton plus haut ! Cachez ce sein que je ne saurai voir ! Elle se prend pour Sophie Marceau la Cassie ?
    9
    Nienna
    Samedi 23 Mai 2009 à 10:32
    Sauvez-la, on est en train de la perdre! Sacrés fantasmes qu'elle a, Cassie^^ Elles sont géniales les couvertures de romans <3
    10
    Rose
    Samedi 23 Mai 2009 à 13:52
    trop beau Link <3
    11
    Isis
    Dimanche 24 Mai 2009 à 18:35
    Tes images sont splendides ! Quel travail ! Et Coriolan, il est agaçant, froid et tout, mais qu'il est craquant tout de même... Enfin, tous deux sont bien complémentaires !
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