• Fusion by Koelia & Link

     

     


    votre commentaire
  • 01

     

    « Comment s'appelle-t-elle? Que s'est-il passé?
    - Louisa Marquand! Nous parlions tranquillement quand elle s'est effondrée sans connaissance! »
    Les sons parviennent à mon oreille mais je ne peux ouvrir les yeux. Je suis étendue sur le sol.

    Mon corps me semble bouillir de l'intérieur. Mon sang est comme de la lave en fusion. « Ça » a donc recommencé. Je ressens avec acuité les mouvements autour de moi. Quelqu'un entreprend un massage cardiaque, un autre la respiration artificielle. On s'affole. Mon cœur a cessé de battre mais je suis toujours là. L'arrivée des pompiers... On me soulève, on m'installe sur un brancard... « Défibrillateur! » La vague de douleur consécutive au choc électrique me vrille les tempes. Mon cœur sursaute, reprend son rythme normal. Je hurle en silence mais aucun son ne sort de mes lèvres closes. Traversée de la ville en ambulance. Arrivée à l'hôpital. Impression de déjà vécu. Terreur.
    « Encore elle ? »


    votre commentaire
  • 02

    02

    Et oui, même joueur joue encore. Quatre fois en six mois. Quatre fois qu'une bonne âme appelle les secours et que je suis conduite aux urgences. Je vais encore subir une batterie d'examens. Puis on va me renvoyer chez moi en me disant « Nous ne comprenons pas, vous êtes en pleine forme. »
    Quatre fois aux urgences, et deux fois seule pendant la nuit, prisonnière de ce corps inerte en fusion interne. Je reconnais la voix de l'infirmière urgentiste. Atterrée.
    « Ce n'est pas possible que ce soit encore elle ! Bon sang, elle approche des 45° cette fois ! Et ses analyses qui ne donnent jamais rien !  »
    Je n'ai rien... Je fais des arrêts cardiaques sans perte de conscience mais je n'ai rien. Ma température corporelle dépasse brutalement les 45° mais je n'ai rien. Lors de ma crise précédente, d'étranges arabesques sont apparues comme tatouées sur mon corps mais je n'ai rien. Rien.


     

    Sauf que ce rien détruit progressivement ma vie. Mon CDD dans un laboratoire pharmaceutique n'a pas été renouvelé. Mon dernier flirt est parti en courant vu que j'ai eu ma deuxième crise en plein cinéma avec lui. Il a adoré... Je n'aurais finalement jamais dû accepter d'aller prendre un café avec Marie. L'agoraphobie me guette. Comment pourrais-je oser sortir de nouveau, avec cette épée de Damoclès suspendue au dessus de ma tête ?
    Un frisson me parcourt enfin. L'accès se termine. J'entends l'infirmière pousser un soupir de soulagement lorsque ma température redescend sous le seuil fatidique des 39°. La sensation de brûlure interne s'atténue et je sens la vie revenir progressivement dans mon corps. La dernière étincelle de douleur disparue, je m'endors instantanément.
    Lorsque j'ouvre les yeux, il fait nuit. J'ai récupéré l'usage de mes muscles. Je meurs de soif. J'arrache brusquement les quelques électrodes qui me relient à je ne sais plus quels appareils pour rejoindre la salle de bain. Je dois affronter l'étendue des dégâts. Qu'y aura-t-il de nouveau cette fois?


    votre commentaire
  • 03

    Je me force à approcher du miroir. Mes jambes se mettent à trembler. Mes yeux ! Ce coup-ci, mes yeux ont changé de couleur ! D'un gris pâle et sans éclat, ils sont passés à un vert de jade étincelant. Paniquée, j'arrache la blouse d'hôpital dont on m'a affublée. Les arabesques sombres recouvrent tout mon corps à présent. Certaines semblent luire doucement. Un gémissement m'échappe.

    « Mais qu'est-ce qui m'arrive ?
    - Vous atteignez l'âge adulte, Louisa. Beau spécimen, d'ailleurs ! »
    Je sursaute en entendant cette voix masculine. Je me précipite sur mon lit pour m'entourer d'un drap. L'inconnu éclate de rire, gentiment moqueur. Il est nonchalamment adossé contre le mur, près de la fenêtre. Je ne peux distinguer son visage dans la pénombre. Mon cœur bat à se rompre.


    1 commentaire
  • 04

    « Qui êtes-vous ? » Ma voix étranglée stoppe net son hilarité.
    - N'ayez pas peur. Je suis là pour vous protéger. »
    J'entends dans le couloir le pas de course de l'infirmière de garde, alertée par l'alarme de mes appareils débranchés.
    - Mademoiselle Marquand! Vous n'auriez jamais dû vous lever !
    Je me retourne mais l'inconnu a disparu. Seuls les battements effrénés de mon cœur témoignent de mon angoisse. Si en plus je deviens folle... Je me laisse rhabiller et coucher sans résistance.
    - Pas ces fichues électrodes! Je vous en prie.
    - Ce sont les procédures normales. Vous avez subi une grave crise cet après-midi...
    - Mais je n'ai rien! Je hurle. Absolument rien! Tous les tests vont encore prouver que mon corps est en parfait état de marche et que mes malaises à répétition n'ont aucune cause ! Ma maladie s'appelle RIEN ! »
    Ma voix hystérique convainc l'infirmière de m'administrer un calmant.
    « Dormez, Louisa, demain tout ira mieux, vous verrez!
    - Jusqu'à la prochaine crise de RIEN ! » je lance juste avant de m'endormir.
    Comme prévu, je repasse pour la quatrième fois tous les tests disponibles dans cet hôpital. Le médecin urgentiste secoue la tête. Il ne sait pas quoi me dire.
    - J'imagine que je n'ai... rien?
    - C'est incompréhensible, me répond-il, embarrassé. Peut-être qu'avec des études neurologiques plus spécifiques... Mon confrère de nuit s'est douté que les résultats seraient encore négatifs. Il m'a laissé pour vous l'adresse d'un neurologue réputé. Il vous a obtenu un rendez-vous pour ce soir! »
    Ce soir? Pourquoi pas! J'ai tout juste trente ans ! L'idée de passer le reste de ma vie dans cet état ne me plonge pas vraiment dans la béatitude. N'importe quelle solution sera meilleure que cette expectative.
    A l'heure dite, je sonne, sans trop d'espoir. L'homme qui vient m'ouvrir me fait reculer d'un pas. Il est torse nu, son corps est superbe mais je ne remarque qu'une seule chose: il est couvert d'arabesque du même style que les miennes, en plus abouties. J'arrête de respirer. Je crois que je vais trouver bien plus que je ne suis venue chercher. Son regard de jade me scrute avec attention. Un sourire charmeur lui échappe.
    04

    « Je ne suis pas exhibitionniste, mais c'était le seul moyen de te convaincre. Entre, Louisa. »
    Cette voix... Je n'ai donc pas rêvé cette nuit. Sans savoir pourquoi j'obéis. Il enfile un T-shirt et je me retrouve installée dans un salon moderne. Il me tend une tasse de thé vert à la menthe.
    « De quoi me protégez-vous? »
    Parmi les milliards de questions qui se bousculent dans ma tête, c'est celle là que je pose.
    - De la bêtise des humains. Mon nom est Gareth. Comme toi, je suis un des derniers dragons vivants sur Terre. Tu es la dernière née de notre espèce.


    1 commentaire


    Suivre le flux RSS des articles de cette rubrique
    Suivre le flux RSS des commentaires de cette rubrique