• 02

    Je sais très bien comment va se dérouler cette journée. Une torture. Il n’y aura là bas que des gens que je connais. Enfin que je suis censée connaitre... Ou plus exactement reconnaitre...
    Tiens ce serait pas mon bus? Attendez, je l’attrape vite et je vous raconte... Merde, mais il me voit pas là ? La grande tarée en noir qui court en hurlant et en gesticulant ? J’ai pourtant un chapeau de la taille d’un couscoussier sur la tête ! Non mais vous allez voir que...
    Bon, je vais m’avancer jusqu’à l’arrêt suivant.
    Bien sûr, je n’en reconnaitrai aucun. A part Azra BenKalish, le compagnon de ma défunte amie Morgane. Mais, et ce sera bien normal, il aura d’autres chats à fouetter que de me tenir compagnie durant la cérémonie...
     
    Sauvée, un taxi libre ! Le temps de monter dedans et... Hey ! Non mais c’est qui cette blonde! Elle me dit quelque chose en plus... Vaguement... Dites, miss, je l’ai vu avant vous... Rah ! Elle est plus près que moi... Sérieux, je ne vais pas arriver à courir avec ces satanés talons... Nom de... C’est ce qu’on appelle se faire voler son taxi sous son nez.
    Dernier espoir, le métro...
    Alors je vais me ridiculiser. Encore et encore. A faire semblant d’avoir des milliers de souvenirs communs avec tous ces gens qui seront comme des inconnus pour moi... A faire semblant de sourire à des détails qui seront censés me rappeler quelque chose de drôle... Et quand je les quitterai, je les entendrai parler à voix basse. Murmurer dans mon dos... Que je suis bizarre... Que je suis légère... Juste assez mondaine pour être polie...
    Grève des métros. J’ai toujours eu beaucoup de chance... Il me reste mes pieds. Ca me fera faire du sport. Si je survis aux échasses que j’ai choisi bêtement d’enfiler avant de partir. Bon, du coup je vais être en retard. En même temps, je suis toujours en retard. J’étais déjà en retard en me levant ce matin, en retard en me couchant hier soir, en retard pour lui dire adieu... En retard pour comprendre son départ... En retard en naissant...
    Donc voilà, s’il y avait un visage, un seul, parmi tous ceux qu’il me sera donné de voir aujourd’hui, que j’avais la chance de reconnaitre, je resterai avec lui. Toute la journée. Pour enfin ne plus avoir à faire semblant. Pour enfin partager vraiment quelque chose de commun... Et n’être plus celle seulement condamnée à avancer dans cette absence... Condamnée à ne pouvoir jamais se retourner. Le passé avalé par le néant. Le vide qu’il a laissé en me quittant. Cette nuit là. Alors que je n’avais que treize ans.
     


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  • 03

    En marchant jusqu’au cimetière je me rappelle de Morgane. Je me rappelle d’elle pas entièrement. Juste des images en pointillés, par à-coups, comme rythmées par le battement de mon cœur qui s’assourdit dans ma poitrine, avec mes pas... Mon stress. L’angoisse de ne pas arriver à masquer ma gêne, là bas, devant ces gens. Me rappeler de ces scènes m’occupe. Ca m’aide à ne pas penser à tous ces regards qui vont se braquer sur moi, quand je vais faire ma satanée entrée...
    J’étais à la fac à l’époque. Morgane était ma colocataire. Et il y avait ce garçon. Je l’avais rencontré dans les couloirs. Il m’avait tapé dans l’œil. On avait sympathisé. Bien sympathisé même. Non, non, pas comme vous le croyez ! Je vous vois venir... Enfin, à l’époque, j’aurais bien voulu, moi, que ça soit comme vous le croyez... Bref...
    Il y a eu un moment où, comme tout le monde, après les études, j’ai fini par les oublier, mais la vie a fait que nous avons pu nous retrouver... Enfin, surtout eux en fait... Mais ça ce sera pour un peu plus tard, si vous le voulez bien.
    Pour l’instant j’ai dix-huit ans. Je suis étudiante en Histoire de l’Art avec ma colocataire Morgane qui suit un cursus en théâtre. Et j’ai cet incroyable béguin pour ce gars qui crèche en licence d’Histoire.
     
    Il y a un lieu privilégié, un passage obligé et quotidien pour tout bon étudiant de fac de Lettres qui se respecte : le café. Tous les étudiants ont un café de prédilection dans lequel ils s’assoient, réinventent le monde entre deux partiels et s’épanchent sur leur difficulté de vivre actuelle et celle à venir. Et c’était précisément ce que nous faisions, Morgane et moi cette après-midi là.
    Elle me faisait part de ses angoisses concernant ses prochains examens, je me lamentais sur mes dossiers entiers de dessins qui me revenaient avec des lettres types, tout juste polies, des maisons d’édition où je les adressais.
     
    Et puis elle s’est penchée, assez près, et m’a murmuré sur le ton de la confidence :
    - Cici (c’était mon surnom à la fac, je détestais mon prénom à l’époque et je ne supportais pas de l’entendre), ne te retourne pas, mais il y a un gars derrière toi, qui te regarde avec... Hmmmm... Insistance on va dire... D’ailleurs il est avec un mec hyper charmant, soi-dit en passant...
    Ne te retourne pas. Mais bien sûr ! Il suffit qu’on vous le demande pour que précisément, vous retourner, ce soit la première chose que vous fassiez. Ce que, inévitablement, j’ai fait.
    Et là, des étoiles ont commencé à illuminer mes yeux ! C’était lui ! Quand je me suis retournée, malgré l’interdiction formelle de mon amie, c’était lui qui me regardait. Il était avec un type, mais qu’importe. Je ne savais plus où j’habitais, ce que je faisais et avant de me rendre compte que je m’étais levée, j’étais devant lui, en train de lui parler.
    - Azra, viens donc t’asseoir avec nous, il y a une table de libre à côté... Et ton pote  peut venir aussi bien sûr...
     
    J’avais jeté à l’intéressé un bref regard de biais. Un grand garçon, beau gosse, avec de magnifiques cheveux noirs mi longs qui retombaient sur ses épaules, qui avait l’air assez mature pour un âge que je supposais proche du mien.


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  • 04

    Ils nous ont donc rejoints à notre table. Eux, leurs sacs, leurs cafés, leurs clopes et leurs bières. Je ne suis pas et je n’ai jamais été ce qu’on appelle une fille discrète et modérée. J’ai plutôt tendance à être rêveuse, passionnée, expressive voire expansive, je l’avoue. Et alors quand je suis amoureuse, c’est encore pire. Je n’arrive d’ailleurs pas à repenser à mon attitude démesurée sans honte aujourd’hui.
    Je crois que si Azra n’a jamais réagi à mes réflexions et gestes insistants c’est qu’il était ou aveugle ou vraiment pas intéressé. Et avec le recul et ce que la suite a démontré, je crains hélas qu’il convient d’appliquer dans mon cas la seconde proposition.
    Il sortait une bourde ? Je riais (même si c’était pas drôle). Il lançait un geste ? J’essayais de m’y accrocher pour pouvoir le toucher. Tout était prétexte pour me faire remarquer de lui. Et si je ne le disais pas par les mots, tout mon corps hurlait : Regarde-moi, regarde-moi, je suis là bon sang, je t’aime !
    Azra se comportait obstinément en bon copain. Chaleureux, amical, mais avec la distance adéquate que l’on s’impose quand on ne veut pas faire croire à l’autre que l’on veut aller plus loin. Et je ne le comprends que trop bien aujourd’hui. Morgane était morte de rire, naturellement, devant mes tentatives ridicules qui tombaient systématiquement à l’eau. Et son copain, mon dieu, son copain... Il semblait me déshabiller du regard avec ce petit air cynique qui me donnait l’impression d’être toute nue devant lui. Donc j’évitais tant que faire se peut de le regarder moi aussi...
    D’ailleurs il finit par se lever. Je crois qu’il ne m’a pas quittée des yeux tout le temps que dura sa phrase :
    - Excuse-moi Azra, mais j’ai encore des révisions pour demain, je vais vous laisser. Bonne après midi.
     
    Il n’avait pas fait vingt pas que Morgane s’était levée à son tour.
    - Moi aussi je dois remettre le nez dans mes bouquins. Cici ? Est-ce qu’en rentrant, tu pourrais passer au centre commercial racheter de la lessive et un peu de beurre, on n’en a plus... Oh mais attends, je vais te faire une petite liste de courses, ça sera plus simple...
    Et elle griffonna sous la table sur un morceau de nappe qu’elle avait arraché, pendant que je cherchais un stratagème pas trop débile pour pouvoir me suspendre au cou de mon voisin.
    Elle me le posa proprement plié dans la main au moment où elle quittait le café à son tour. Je me rappelle m’être levée, moi aussi.
    - Morgane attends, je ne vais pas m’éterniser non plus, on peut y aller ensemble si tu veux !
    Mais c’est là que j’ai senti la pression de sa main sur mon bras. Cette pression qui m’avait parcouru comme une décharge électrique et qui m’avait soudain bercée d’un torrent d’espoir.
    - Tu as une minute, Cici ? m’interrompit, Azra, je voudrais te parler de quelque chose...
    On y était ! On y était enfin ! J’allais avoir une discussion avec Azra... Vous vous imaginez bien ce dont il allait vouloir me « parler » bien sûr ! Forcément, puisque je m’imaginais exactement la même chose ! Je me suis sentie brusquement nerveuse, idiote et maladroite alors que j’attendais ce moment depuis des semaines.... Et pour me donner une contenance j’ai commencé à lui parler de son copain cynique qui me transperçait de son regard...
    - Ahah ! Me parler, oui, bien sûr... Dis donc, au fait ton pote, il me fait penser à un cactus.... Sérieux ! Tu sais comme la chanson de Dutronc...
    Et là, misère de moi, je me suis mise à chanter devant tout le monde. Ouais, l’amour ça rend vraiment très bête parfois.
    J’approche de la grille du cimetière et je sens que je rougis. C’est idiot, douze ans après ça me fait encore rougir...
    - Le monde entier est un cactus ! Dans mon lit, j’ai mis des cactus, dans mon slip, j’ai mis des cactus, aïe, aïe aïe ! Ouille ! Aïe !
     
    Heureusement, Azra, lui, n’était pas amoureux. Il m’a empoignée par le bras, rassise sur ma chaise et commandé rapidement un thé à une serveuse très jeune et très maladroite pour me faire taire. Alléluia ! Je me rappelle de cette interruption brutale de ma vocation de chanteuse au moment où je me rends compte que je fredonne encore ces cactus au fil de mes souvenirs, en traversant l’allée qui me sépare du crématorium.
    Azra m’a regardée longuement en rougissant. J’avais le cœur au bord de l’explosion. Dis-le, sérieux dis-le ! C’est oui, oui tout de suite ! Oui quand tu veux ! Dis-le !
    Et pendant qu’il cherchait visiblement ses mots d’un air gêné, j’ai trituré la liste que Morgane m’avait donnée, et que j’avais toujours en main. Je l’ai dépliée et lue au moment même où Azra avait fini par trouver la meilleure formulation possible à sa question.
    - Dis, ta copine Morgane... Elle a quelqu’un ?
    « Alerte, Cici, me prévenait la petite écriture hachée et régulière de Morgane sur le papier, c'était pas Azra qui te regardait ! C'était son pote ! »
    C’est là je crois que je me suis effondrée sur la table, en renversant à moitié mon thé sur le pauvre garçon. J’ai eu le sentiment de me prendre un retour de cactus dans la figure. Et je le confirme, les cactus, ça pique. Le regard pénétrant de l’ami d’Azra me défigurait dans ma mémoire comme s’il me transperçait de ses aiguilles. C’est là, je crois aussi que je l’ai dit pour la première fois. Avec le visage insolent de ce gars collé à mes rétines comme une sentence irrévocable.
    « - Je veux mourir... »
     


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  • 05

    Evidemment, lorsque je suis arrivée, ils avaient tous quitté l'église depuis plusieurs minutes. J'ai dû courir (en me tordant quinze fois la cheville) à  travers toutes les allées du cimetière pour rejoindre le cortège. Ils n'étaient pas bien nombreux. Ce petit comité m'a surpris au premier abord. Ils venaient de descendre le cercueil dans la tombe.

    Morgane ne m'en voulait surement pas de mon retard.

    Morgane savait bien que je serai en retard aussi pour ça (même pour ça, oserai-je dire).

    Morgane avait de la tendresse pour tous mes actes manqués.

    Les autres, en revanche...

    J'ai pourtant ralenti le pas quand j'ai aperçu l'assemblée en haut de la petite butée. Un peu à
    l'écart. J'ai pourtant fait attention à  ne pas faire trop de bruit. A ne pas me faire remarquer.

    Mais rien que le déplacement de l'air, dans ce silence pesant, a suffi à attirer tous les visages vers moi.

     

    La première phrase qui me vient alors à l'esprit est stupide et sans intérêt. En même temps je préfère la libérer avec cette tension palpable qui me compresse à  m'étouffer.

    - C'est la dernière fois que je mets ce chapeau...

    J'entends quelques soupirs. Je surprends quelques haussements d'épaules. Puis tout rentre dans l'ordre. Ils se désintéressent de mon cas désespéré.

    Ne t'inquiète pas Morgane, je ne te volerai pas la vedette aujourd'hui.

    Je calme le bouillonnement intérieur qui me secoue de sueur et de fièvre en détaillant les silhouettes qui se sont retournées.

    Tous me sont familiers. Ce grand blond par exemple, je sais que je l'ai connu. Mais d'où déjà  ? Il est accompagné par cette créature aussi blonde que lui, enceinte jusqu'aux yeux, gracile et féminine. Ses traits me parlent. Vaguement. Je ne parviens pas à  la remettre.

     

    Et tiens, cette fille aux cheveux rouges... Celle qui fait la tête de celle à  qui on a volé la soupe... Je l'ai surement croisée toute ma vie. Son visage fermé semble m'indiquer que sa mauvaise humeur n'est pas exactement due au chagrin. Croisée. Parlé à peine. Ou tout juste regardé. Je ne sais plus. Je ne me rappelle plus avec certitude.

     

    Le jeune homme maladroit, qui parle à  tout le monde, me dit aussi quelque chose. Je crois l'avoir vu à  plusieurs reprises chez
    Morgane. Mais son nom... Les circonstances, les liens m'échappent. Tout se découd, se découd si vite dans mon esprit...

     

    Je recule de quelques pas. Je ne veux plus en regarder d'autres.

    Quelques yeux prennent de nouveau appui sur mon visage maladroit. Mes gestes moites. Remplis de reproches.

    Tiens, encore en retard la greluche ?

    Décidément pas fichue d'arriver à  l'heure celle-là . Même aux obsèques de son amie.

    Si encore elle était discrète, mais elle n'a pas trouvé plus grand comme chapeau ? Elle compte faire le service des boissons
    avec ou quoi ?

    Est-ce qu'elle est sûre au moins d'être au bon enterrement, cette idiote ? Après tout, elle aurait été capable de suivre un cortège au pif du cimetière, avec sa mémoire de poisson rouge. Comme un petit chien.

    Mes pensées acides m'arrachent un petit rire léger.

    C'est ma réponse à  ces yeux accusateurs. La seule lutte que je me sens apte à leur confronter.

    Et dans cette foule de regards dédaigneux, je repère soudain deux prunelles d'onyx, dont la bienveillance et la tendresse apaise progressivement la compression de mes pauvres viscères meurtris de honte.


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  • 06

    Lentement, je m’avance vers lui.
    Ses yeux sont rouges d’avoir trop pleuré. Je le prends dans mes bras. Il murmure doucement quelque chose à mon oreille.
    - Je vais te sauver, Cassie. Merci d’être venue.
    Il a compris. Il sait. Malgré tout, le soulagement n’arrive pas à me gagner.
    - Merci, Azra.
     
    Je me décroche de sa poitrine. Pendant que chaque invité achève de jeter ses derniers mots, ses dernières fleurs, ses derniers regards en bas, Azra remplit ma main d’une poignée de terre.
    - Vas-y, Cassie.
    Il n’y a plus rien que ce coffre de sapin désormais. J’ai peine à me dire qu’à l’intérieur il y a le corps de mon amie. J’ai l’impression que plus rien n’a de substance et que je m’adresse à une boîte aussi vide que ma mémoire, en jetant la terre que m’a confiée Azra.
    - Adieu Morgane.
    C’est court.
    C’est nul.
    C’est inconsistant.
    En même temps, c’est tellement moi...
    Mais je ne sais pas quoi dire d’autre.
    Et tant pis si je sens encore les regards insistants des autres.
    Qu’ils pensent ce qu’ils veulent.
    Je n’ai pas besoin d’une tirade pour exprimer mon chagrin. Il ressurgira avec le temps. Avec l’absence. Et je saurai alors mettre les mots qu’il faut. Dans l’intimité. Mais je ne livrerai pas mes sentiments devant cette assemblée qui me méprise.
    Méprisez-moi.
    Méprisez-moi, vous qui savez si peu de moi en fin de compte.
    Je ne me rappelle pas de vous, car vous n’avez aucune importance. Vous vous souvenez de moi. Vos regards me prouvent que vous ne m’avez jamais oubliée. C’est ma revanche.
    Je me tourne vers Azra.
    - Tu pourrais me présenter à quelqu’un que je connais ?
    Il se penche à demi. Je l’entends chuchoter.
    - Je ne me rappelle pas vraiment qui tu as déjà vu ou pas... mais...
    Il hésite. Il balaye l’assistance des yeux. Soudain il a un mouvement d’arrêt. Son visage s’éclaire.
    - Bien sûr ! Lui, tu le connais ! Je m’en rappelle... C’était à la fac. Viens avec moi !
    Nerveuse, je glisse ma main dans la sienne. Et allez ! Les regards bis repetita ! En même temps, c’est pas comme si j’avais pas l’habitude...
    Il y a les filles qui attirent le regard par leur beauté. Celles qui l’attirent par leur esprit. Je l’attire par le ridicule. Et s’il y a une chose que mes trente années de vie m’ont enseignée : c’est que, résolument, le ridicule ne tue pas.
    La preuve ! Je suis toujours là.
    Nous nous avançons à travers ces autres. Fendant leur cohésion qui me renvoie à ma propre gêne.
    Et son corps est encore chaud.
    N’a-t-elle pas honte, devant son cercueil ? Donner la main à Azra ?
    Aucun scrupule, cette fille n’a aucun scrupule.
    Le bout du chemin est marqué par la silhouette d’un grand gars à la longue chevelure noir-de-jais. Azra pose une main sur son épaule.
    - Cassie ? Tu te rappelles de mon ami d’enfance ?
    Je blêmis. J’ai chaud. Mon sang monte tellement en pression que j’ai peur qu’il jaillisse par tous les pores de ma peau.
    Je ne l’éviterai pas. Pas cette fois.
    Perdu Cassandre. Cassandre perdue.
    Même joueur joue encore.
    En effet, de tous ici, lui... Lui... Lui ! Lui, je ne l’ai pas oublié.
    - Cassandre Parlanti, Coriolan Galen, nous présente courtoisement Azra d’un ton doux.
    Coriolan prend la main tremblante que je lui tends.
     
    Et ça y est... Je suis de nouveau toute nue. Je me couvrirais bien le corps de mes bras si je trouvais le moyen de récupérer la main qu’il tient toujours dans la sienne. Il faudra un jour qu’il m’explique comme il fait pour m’arracher tous mes vêtements aussi vite. Il les fait fondre, c’est pas possible...
    - On se connait, répond Coriolan sans me quitter des yeux.
    Sans me lâcher. Avec cet air cynique, ce mépris qui démontre manifestement un certain ennui de se retrouver à la colle avec la pimbêche de service.
    Le malaise est total.
    Cette fois je suis à terre. Je suis sous terre. Morgane. Avec toi. Enterrée vivante par le seul regard qui m’a toujours sondé plus profondément que les autres.
    Je souris de toutes mes dents.
    J’ai l’air d’une idiote.
    Ce qui veut dire pour les autres que j’ai l’air normale. Donc, quelque part, tout va bien.
    Mais c’était trop tard. Je l’avais dit. Encore. Je l’avais sifflée entre mes dents cette phrase que je ne sais décidément pas retenir. Hélas.
    - Je veux mourir...


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